Avoir le tact dans les yeux, dépouiller son regard de l’usage commun, voir de ses propres yeux : c’est ce que nous propose Céline Trinquet avec ses céramiques aux formes organiques complexes et étranges, espèce de cabinet de curiosités, où l’artiste s’inspire moins des modèles imposés par la nature que par des procédés de création aléatoire. Ici, le hasard s’affirme comme principe interne, un jeu dont l’erreur est entendue comme détour nécessaire où la beauté trouve sa vraie place.
Le résultat ? Des bizarreries matérialisant le mouvement accidentel : soit en tant qu’évolution, processus de transformation, métamorphose dans un sens double et indéterminé ; soit comme changement de nature selon le point de vue de l’objet dans l’espace ; ou encore dans le déplacement référentiel du sujet en s’aventurant sur la superficie dessinée des objets et de ses multiples paysages.
Céline nous prouve ainsi que le désordre n’a de réalité que pour le spectateur aliéné dans l’observation et que le produit de la synthèse mentale de l’objet est toujours inattendu. De même, en utilisant la céramique comme support à ses dessins, l’artiste crée cette ambiguïté entre volume réel et apparent à travers ses traits fins et souvent discontinus, suggérant sur certaines de ses œuvres des rapports entre cartes anatomiques et topos de paysages imaginaires.
Voir de ses propres yeux c’est emprunter le regard de l’enfant, c’est à la fois jouer et sortir du jeu, c’est se réjouir dans la contemplation de la nature recréée.Céline a joué. À vous de faire de même…