La « section » Afrique nous accueille avec la pierre-lyre de Soto, Sénégambie ; ce mégalithe vieux de plus de 1000 ans, parmi d’autres, aurait eu, comme nos menhirs bretons, un rôle astronomique. Il a été déposé en 1967, par le Président sénégalais Sédar Senghor à l’ancien Musée des Arts Africains et Océaniens, en échange de 12 tapisseries d’Aubusson, dans le cadre d’un protocole de prêt réciproque.
Marie nous présente ensuite, après nous avoir baignés dans le parfum de fleur d’oranger, les poteries, modelées à la main, par les femmes Kabyles d’Algérie ; ces poteries, sont couvertes de symbole de fertilité et le portrait d’une de leurs créatrices la présente avec toute une parure de bijoux en argent.
Dans ces régions du Maghreb (Algérie, Maroc, Lybie, Egypte), l’argent est LE métal précieux ; on lui prête en outre des vertus prophylactiques (qui prévient des maladie) et donc il porte chance. On lui adjoint parfois le corail, rouge comme le sang, le sang, c’est la vie ! la fécondité… les parures comprennent des diadèmes, des pendants de voile, des torques & colliers, des fibules, dont les tabzimt, des bracelets de poignets et de chevilles. Ces parures, qui peuvent peser de 3 à 5 kgs, au total, constituent, par ailleurs, la dot de la mariée. Les tabzimt sont également offerts pour les naissances, plus grandes, s’il s’agit de garçons ! Parmi les motifs décoratifs de ces parures : la main de Fatma : symbole commun aux musulmans et aux israëlites (main de Myriam) représentant : les 5 doigts de la main, les 5 piliers de l’Islam, les 5 livres sacrés de la religion juive ; elle peut aussi être ornée d’un œil en son centre, pour conjurer le mauvais œil.
Nous découvrons ensuite un khalaqa, robe de fête de Jordanie, de 1920, ½ coton,1/2 soir, aux dimensions extraordinaires ; elle se revêt de façon très élaborée, afin de laisser les broderies du bas apparaître sous les 3 épaisseurs superposées, retenues par une ceinture ; ses manches proportionnées, en pointe, servent aussi à couvrir la tête, et peuvent, nouées ensemble, dans le dos, être utilisées pour porter un jeune enfant.
Marie nous présente après cela la culture très particulière des Touareghs, en nous présentant les accessoires pour les meharis (dromadaires) : sac, coussins et tapis de selle de cuir, décorés par les femmes, qui y représentent les tentes (elles-mêmes ! le mot est le même en tamasheq (tamazirt, langue des Berbères du Maroc)) par des cercles de couleur bleu-vert : LA couleur des Touaregh ;
La sociéte touarègue, vivant en Algérie, Maroc, Mali, Niger et Lybie, ne dépend pourtant d’aucun de ces pays ; elle est, en outre, matrilinéaire : la femme, qui est maîtresse et propriétaire de la tente est, d’après la cosmogonie, à l’origine de la vie, associée à une goutte d’eau ; l’homme associé à la zone où cette goutte d’eau s’est répandue, n’est propriétaire que du bétail et responsable de l’activité commerciale ; en effet, les Touareghs ont été, de tout temps, des passeurs sur les routes commerciales, y compris pendant le commerce triangulaire des négriers. (sel, indigo, esclaves...). De moins en moins nomades, leurs deux grands centres sont Tamanrasset et Agadès. Ils ont une langue, une écriture et une religion particulières ; ils sont majoritairement monogames.
Nous entrons ensuite dans la salle, très haute de plafond, abritant les masques Dogons du Mali.
Les masques, éléments communs à toutes les cultures du monde, revêtent en Afrique un rôle très important ; ils sont sacralisés ; quand le danseur (seuls les hommes tiennent ce rôle) revêt le masque, il incarne ce que ce dernier représente (lapin sautillant, singe intelligent…)
Le masque le plus haut (et, peut-être, le plus lourd, 5 à 6 kilos) sirigé, représente une maison à multiples étages, symbolisant le grenier où sont placées les récoltes ; le danseur le maintient par un embout qu’il serre entre ses mâchoires et doit lui faire toucher terre, tantôt en avant, tantôt en arrière, sans le brise, ce qui serait de très mauvais augure pour les récoltes de l’année suivante.
Les masques, têtes en bas, kanaga, sont des renards pâles morts ; ils sont portés, « animés », lors des cérémonies de lever du deuil : dama ; on raconte que le dieu awa avait modelé un œuf et, l’ayant fait éclater, a créé tout ce qui est au monde, les éléments, les animaux, les végétaux, les terres et les océans, le bien et le mal…. Seul Yurubu n’avait de complément, de double ; pour palier ce manque, il a fini par créer la mort ; le dieu awa, pour le punir, l’a transformé en renard et lui a coupé la langue ; sans langue, il ne pouvait plus ni parler (transmission orale vitale) ni boire ; il est donc mort, d’où la tête en bas et les 4 membres étalés.
Un peu plus loin, nous admirons 3 statuettes de Maternité, de Côte d’Ivoire, du début du XXème siècle, dont une, dont nous connaissons l’auteur : Zlan de Béléwalé (Libéria) ; elle a été commandé par un notable de Côte d’Ivoire, en hommage à sa femme défunte. Archétype de la beauté : jambes puissantes, coiffure élaborée, poitrine lourde (elle porte un jeune enfant dans son dos), portant scarifications d’identité, sandales et bijoux de haut rang.
Nous entrons ensuite dans une salle présentant :
2 têtes géantes, en bronze à cire perdue, du Royaume du Bénin (envahi par l’empire britannique en 1897, auj au Nigéria), de la fin du XVIIIème s, peuple Edo ; surmontées d’immenses défenses d’éléphants sculptées (1 défense devant être fournie, en impôt, par les chasseurs, pour chaque animal abattu), elles servaient d’ornements aux autels dédiés aux ancêtres des souverains.
Des figurines, sexuées, par 2, 3 ou 4…. , de même provenance, mais de la fin XIXème/début XXème s ; si les naissances multiples, selon les pays et les époques, sont tantôt très appréciées, tantôt très mal vues, le peuple Yoruba, après une longue période, où on ne gardait en vie qu’un enfant, supprimant même parfois la mère (impure, sorcière ?), confrontés à un problème démographique et, peut-être après une naissance multiple, chez le roi lui-même !, a cessé de les sanctionner. Par contre, si l’un ou plusieurs venait à mourir, il semblait indispensable, pour protéger le/les survivants de créer un substitut, pour éviter que le mort ne vienne chercher son/ses frères ; ce sont ces ere (image sacrée) ibeji (né double).
Marie nous rappelle, qu’en Occident, les femmes accouchant de jumeaux ou plus, étaient considérées, et traitées comme sorcières au Moyen-Age et à la Renaissance.
Nous finissons ce trop rapide tour d’horizon par une sculpture en bois : Reine porteuse de coupe, du Cameroun, population
Bamiléké, du XIXème siècle. Le bois est recouvert d’un tissu brodé de perles multicolores ; l’art du perlage est caractéristique de l’art de Cour Bamiléké.
Ces perles sont un signe de puissance et de richesse, puisqu’elles viennent de Murano ; on peut penser que ces perles ont d’ailleurs été payées avec des esclaves. La verroterie vénitienne représentait entre 1/3 et ¼ des marchandises embarquées par les navires négriers, au départ des ports européens. Les esclaves étaient ensuite embarqués pour les Caraïbes et le Brésil, voués aux travaux forcés et échangés contre des denrées coloniales, rapportées vers l’Europe
La statue porte aussi des cauris, réservés à la famille royale au Cameroun. (les cauris ou monetaria moneta, ont également servis de monnaie, tant en Chine 1500 ans avant JC, que, plus tard dans une grande partie de l’Afrique et de l’Océan Indien). Aujourd’hui encore, certains états africains les utilisent en complément du franc CFA.
Son trône, porté par une panthère rappelle son pouvoir de se transformer, ad libitum, en panthère, comme le roi, lui, peut le faire en éléphant.